Transferts conventionnels ou sous autorité de justice : quels droits pour les travailleurs ?
« Protéger les travailleurs en cas de changement de chef d’entreprise en particulier pour assurer le maintien de leurs droits », faire en sorte que le transfert soit neutre du point de vue des droits qu’ils tirent de leur contrat de travail et réduire les écarts en ce qui concerne la protection offerte aux travailleurs par les différents États membres en vue de favoriser le fonctionnement du marché intérieur, tels sont les objectifs de la directive européenne 2001/23/CE, conçue comme un instrument destiné à la fois à améliorer la condition des travailleurs et à réaliser le marché intérieur en rapprochant les charges qu’entraînent ces règles de protection pour les entreprises de l’Union.
Hormis dans le cas de la faillite, dont il ne sera pas question dans cet ouvrage sinon de manière très sommaire, les aspects sociaux d’un transfert d’entreprise obéissent à l’un ou l’autre des deux régimes que connaît le droit belge. Le premier, destiné à transposer la directive 2001/23/CE, concerne le transfert dit conventionnel et est inscrit dans la convention collective de travail n° 32bis du 17 juin 1985. Le second résulte d’une combinaison du Code de droit économique et de la convention collective n° 102 du 5 octobre 2011, qui offre, aux entrepreneurs aux abois, une voie de sauvetage de leur entreprise appelée transfert sous autorité de justice. Les conséquences sociales de celui-ci sont, selon le vœu explicite du législateur, exclues du champ de la convention n° 32bis. Nettement moins protectrice que sa cousine 32bis, la convention collective n° 102 s’inspire partiellement de celle-ci mais s’en écarte sur divers points et met en péril le respect, par la Belgique, de ses engagements internationaux.
C’est à ces deux régimes juridiques qu’est consacrée cette étude ; ils illustrent les liens tendus qu’entretient le droit de l’entreprise en difficulté avec le droit du travail et reflètent le point actuel du rapport de force entre le monde économique et les syndicats. Ces régimes sont étudiés au regard des exigences du droit européen, avec une attention soutenue pour la jurisprudence foisonnante de la Cour de justice de l’Union européenne qui façonne l’interprétation, par le juge belge, des dispositifs nationaux.